La question de la douche quotidienne, convention sociale pour les uns, geste d'hygiène incontournable pour les autres, ne laisse personne indifférent.
Se doucher tous les jours est-il indispensable et bon pour notre santé ? Rien n’est moins sûr, voici pourquoi.
À l'étranger, les Français ont la réputation d’être quelque peu laxistes en matière d'hygiène corporelle.La raison ? Une enquête parue dans les années 1950 dans le magazine "Elle." mettait en évidence les conditions déplorables d’hygiène en France.
C’est cet article qui serait à l'origine des clichés sur le manque de propreté des Français.
De cette réputation peu flatteuse serait né, aux États-Unis, le personnage de dessin animé malodorant « Pépé le putois ».
Il faut dire qu'à l'époque tout le monde n'avait pas accès à l'eau chaude et à une pièce dédiée à la toilette.
Une étude menée en 2024 montre que la norme a bien évolué, et pourtant, tout le monde ne se plie pas pour autant à la douche matinale quotidienne.
D’après cette étude, 76 % des Français font une toilette complète tous les jours, (81 % pour les femmes contre 71 % pour les hommes).
À titre de comparaison, en 1950, seule une femme sur deux se lavait quotidiennement.
L’absence de douche quotidienne dépend de nombreux facteurs comme l'âge, le fait de vivre en ville ou en zone rurale, ou la catégorie sociale.
Aujourd’hui, la France est dans la moyenne mondiale en termes de pratique d'hygiène.
Seuls les Australiens, les Colombiens, les Mexicains, les Brésiliens et les Indonésiens nous battent à plate couture avec une moyenne de 7 à 12 douches par semaine ! En revanche, nous nous situons devant les Anglais, les Allemands, les Russes et les Chinois.
Se laver… une histoire de mode
La propreté corporelle a, tout au long de l'Histoire, connu des normes très différentes.Les Romains étaient férus des bains publics. Se laver consistait alors à s'enduire d'huile, à transpirer dans les bains et à se racler la peau à l'aide d'un ustensile en métal pour retirer la crasse.
En Europe, plusieurs épidémies au Moyen-Âge ont instillé l'idée que l'eau était source de maladies.
C'est ainsi que la toilette sèche est entrée dans les mœurs à la Renaissance. On se frottait alors simplement le corps avec un linge propre et l'on se contentait de changer de chemise. Personne n'aurait songé à vous dire que vous étiez sale en faisant ainsi.
Au XIXème siècle, un lavement à l'éponge et à la bassine était de mise.
Mais aujourd’hui, les odeurs corporelles sont intolérables.
Si bien qu’en plus de beaucoup nous laver, nous masquons le moindre effluve naturel à grands renforts de savon, de parfums, et autres déodorants.
Seule gagnante de cette bataille contre les mauvaises odeurs : l’industrie cosmétique.
Elle empoche chaque année des centaines de millions sur notre dos. Car après nous être trempés, savonnés puis exfoliés, nous devons nous couvrir de crème hydratante pour adoucir notre peau sèche et éviter les démangeaisons qui vont avec.
Quelle ironie !Le plus grand organe du corps est fragile
Le principal problème dans le fait de trop se laver est simple : nous abîmons notre peau.Cet organe (le plus grand que nous ayons) est constituée d’un film hydrolipidique protecteur qui joue un rôle barrière considérable contre les invasions bactériennes. Ce film a des propriétés très spécifiques, il est composé d’un pH acide, d’une flore bactérienne bien à lui, etc.
Or, les gels douche, les savons et l'eau souvent calcaire de nos habitations fragilisent ce film et le déséquilibrent.
les produits cosmétiques :
Au-delà des substances suspectes voire cancérigènes, que l'on trouve dans les cosmétiques (parabènes, triclosan, benzophénone, phénoxyéthanol, sodium lauryl sulfate...) certaines pathologies associées à un excès d'hygiène sont récurrentes.Notamment :
l’eczéma ;
le psoriasis ;
les verrues ;
les dermites en tous genres ;
une moindre résistance aux agents infectieux et aux allergies.
Le Dr C. Brandon Mitchell, dermatologue à l’Université Georges Washington, le confirme : « Je pense que la plupart des gens se lavent trop... Votre corps est une mécanique bien huilée, une douche quotidienne n’est pas nécessaire, une ou deux par semaine suffisent amplement ».
Même discours en France : « En dermatologie, nous recommandons de ne se laver qu’un jour sur deux lorsqu’on veut limiter les problèmes de peau, notamment chez les enfants », affirme Nina Ross, dermatologue à Paris.
Le phénomène Unwashed
Aux États-Unis les « unwashed » (littéralement les « pas lavés ») et leur mouvement remettent en question nos habitudes. Leur credo ne consiste pas à arrêter de prendre soin de soi, mais à prendre soin de soi différemment.
Richard Nikoley compte parmi les pionniers de cette tendance.
En 2009, il relatait sur son blog son expérience similaire à celle de James Hamblin dont je vous parlais au début de ce message.
Tout comme ce dernier, il affirme qu'après une période désagréable où son corps a dégagé de fortes odeurs, une régulation naturelle s'est mise en place.
L’arrêt du shampoing s’est manifesté dans un premier temps par une phase où s’est cheveux ont été un peu gras, puis peu à peu ils sont redevenus soyeux et bien plus beaux qu’auparavant.
Idem pour sa peau.
Son témoignage n'est pas marginal et la toile regorge de personnes ayant obtenu le même résultat.
Nulle maladie ou exclusion sociale à l'horizon !
Comment se laver autrement ?
Si les unwashed zappent eau et savon pour un retour au naturel et contre les normes de la société de consommation, ils n'ont pas pour autant abandonné toute forme d'hygiène.
Voici quelques idées pour être parfaitement propre en préservant votre équilibre naturel.
- Le spray "Mother Dirt" développé par le chimiste David Whitlock (chercheur au MIT). L'efficacité de ce produit repose sur une bactérie naturelle, nommée Nitrosomonas Eutropha. Elle a le pouvoir de décomposer l’ammoniac, le composé chimique responsable de l’odeur de transpiration. David Whitlock assure que son spray lui permet de ne pas sentir mauvais, même sans prendre de douche.
- Le rhassoul ou ghassoul. En langue arabe, cela signifie « se laver ». Cette argile douce est utilisée depuis le XIIème siècle. Elle possède un exceptionnel pouvoir absorbant grâce à sa haute teneur en silice. Son application sur la peau permet d'en éliminer les impuretés et autres toxines. Le rhassoul est un parfait nettoyant et désincrustant naturel qui n'irrite pas l'épiderme, contrairement à de nombreux produits cosmétiques.
Faites des toilettes partielles (visage, pieds, aisselles, parties intimes) simplement à l'eau claire ou avec de l'aloe vera (en gel ou même en jus) le plus souvent possible afin de réduire la fréquence de vos douches.
Pour les cheveux : évitez le lavage trop fréquent qui a tendance à les faire graisser rapidement. Pas plus d’une à deux fois par semaine. En revanche, brossez-les souvent. N’utilisez un sèche-cheveux que s’il diffuse un air tiède, la chaleur les assèche et les rend plus fins et cassants.Pour les dents : la plupart des dentifrices contiennent des substances irritantes comme le sodium et l’ammonium lauryl sulfate (une cause fréquente d’aphtes à répétition), des perturbateurs endocriniens comme le triclosan, du dioxyde de titane (probable cancérigène) et bien sûr des parabènes...
Pour un bon dentifrice maison vous pouvez mélanger 3 cuillères à soupe d’huile de coco vierge, 1 cuillère à café de bicarbonate de soude, 1 cuillère à café d’argile blanche, quelques gouttes d'huile essentielle de tea tree (arbre à thé), de menthe douce ou de manuka.Pour les aisselles : la pierre d'alun est très efficace mais attention seule la pierre d’alun kalunite est garantie sans hydroxyde d’aluminium !
Lavez-vous les mains sans modération ! Ce dernier point est sans doute le plus important. Le lavage soigneux des mains reste la première, et la plus indispensable des mesures d'hygiène.
Prenez soin de vous et de votre peau. La nature fait bien les choses.
À bientôt,
Laurent