mercredi 26 janvier 2022

Le message émouvant et véridique du Père François

Évangile de Jésus Christ selon St Luc 4 21–30

 

 

« En ce temps-là, dans la synagogue de Nazareth, après la lecture du livre d’Isaïe, Jésus déclara : «Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre. » Tous lui rendaient témoignage et s’étonnaient des paroles de grâce qui sortaient de sa bouche. Ils se disaient : « N’est-ce pas là le fils de Joseph ? » Mais il leur dit : « Sûrement vous allez me citer le dicton : “Médecin, guéris-toi toi-même”, et me dire : “Nous avons appris tout ce qui s’est passé à Capharnaüm ; fais donc de même ici dans ton lieu d’origine !” » Puis il ajouta : « Amen, je vous le dis : aucun prophète ne trouve un accueil favorable dans son pays. En vérité, je vous le dis : Au temps du prophète Élie, lorsque pendant trois ans et demi le ciel retint la pluie, et qu’une grande famine se produisit sur toute la terre, il y avait beaucoup de veuves en Israël ; pourtant Élie ne fut envoyé vers aucune d’entre elles, mais bien dans la ville de Sarepta, au pays de Sidon, chez une veuve étrangère. Au temps du prophète Élisée, il y avait beaucoup de lépreux en Israël ; et aucun d’eux n’a été purifié, mais bien Naaman le Syrien. » À ces mots, dans la synagogue, tous devinrent furieux. Ils se levèrent, poussèrent Jésus hors de la ville, et le menèrent jusqu’à un escarpement de la colline où leur ville est construite, pour le précipiter en bas. Mais lui, passant au milieu d’eux, allait son chemin. »

 

  Le 19 janvier dernier, dans le Jura, quatre jeunes ont trouvé la mort, quand leur voiture a sombré dans le lac de Chalain. Ce drame ne fait que rallonger la liste noire des accidents mortels de nos jeunes. Comme tous les jeunes de leur âge, ils aspiraient à faire la fête, à la tendresse, à l’amitié et à la réussite. Mais combien de jeunes aujourd’hui ont perdu repères et sens à leur vie. A la différence de Jésus et des générations passées, les jeunes d’aujourd’hui ont grandi avec des jeux électroniques, IPhone… dans les mains. Ils sont marqués par tout ce qui est virtuel et ne voient plus la distance avec le réel. On filme et on envoie sur les réseaux des accidents, voir des viols. Je me souviens, il y a quelques années, des jeunes filles, stagiaires dans une maison de retraite, service Alzheimer, s’amusaient à ridiculiser ces personnes en les filmant. Elles se croyaient intéressantes en communiquant ces images à tous leurs copains sur Internet. Elles n’ont même pas soupçonné qu’il y avait un problème grave comme tant de jeunes qui disent : « Oh, c’était pour rire ! » Il y a une forme d’inconscience qui tourne en violence quand ça ne marche pas comme ils veulent. 

 

Il est un fait, tous nos jeunes aspirent à être aimés, à être reconnus et valorisés pour ce qu’ils sont et, ils attendent que les adultes les prennent plus au sérieux. Je mesure les conflits qui peuvent exister entre les parents et les ados en pleine croissance ! Ça demande écoute réciproque, patience, et partage de l’expérience des adultes et la nouveauté des jeunes.

Je dirai malheureusement notre société fonctionne tout autrement : elle est régie par les lois économiques, les rapports de forces et d’intérêts. Et là il n’y a guère de place au sentiment, à la considération et à l’amour. La violence prend de plus en plus de place dans toutes les revendications. N’y a-t-il pas d’autres solutions pour se faire entendre et pour exister que la casse et la destruction. En aucun cas ça ne peut pas être une perspective de changement. 

 



Chrétiens, depuis notre tendre enfance, nous avons appris que Dieu est Amour et que la vocation de tout Homme est d’aimer et d’être aimé comme Dieu nous aime. A tous ceux qui ne savent plus très bien pourquoi ils sont sur terre, je leur dis : nous sommes là pour apprendre à aimer, à goûter la joie de vivre et à connaître, au terme de ce long apprentissage, les bienfaits de l’Amour. Dans sa lettre aux Corinthiens, l’apôtre Paul dit : « J’aurais beau tout connaître, tout partager, tout endurer, s’il me manque l’amour, je ne suis rien ».

 

La drogue, la délinquance, la folie, le suicide, tous les extrémismes ne sont-ils pas la conséquence du manque de dialogue, d’Amour ? Devant ce douloureux naufrage, on cherche obstinément la boîte noire de l’accident. Résultat, on retrouve le manque d’amour : celui qui n’a pas su ou pu recevoir l’amour comme celui qui n’a pas su ou pu le donner. N’oublions pas qu’on ne naît pas violent, délinquant, mais on le devient par manque de chaleur humaine, de considération.

 

A tous les écorchés de la vie, Jésus apporte la vraie libération au risque de ne pas bien se faire comprendre et d’y laisser sa vie lorsqu’ils veulent le précipiter dans l’escarpement de Nazareth. En quelque sorte, Jésus en a assez de tous ces faux semblants, de tous ces enfermements, de tous ces rajouts à la loi de Moïse. Il veut donner un souffle nouveau à la foi au Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. Il veut que ces concitoyens soient des Hommes libres et responsables, qui n’ont pas peur de s’investir pour la paix et la justice. Comme le saint pape Jean XXIII, par le Concile de Vatican II, voulait ouvrir la fenêtre pour laisser entrer un peu d’air frais, car l’Eglise en avait bien besoin. Aujourd’hui, tout semble bien loin. Au lieu d’ouvrir les fenêtres, certains courants dans l’Eglise se replient frileusement sur « les certitudes » comme si on pouvait revenir en arrière. 

Interviewé dans La Croix Hebdo du 22 janvier, le Cardinal Jean-Claude Hollerich, archevêque de Luxembourg, disait : « Pour être entendue, l’Eglise doit changer de méthode….Le message de l’Evangile est toujours pertinent, mais les messagers apparaissent dans des costumes des temps passés….c’est pourquoi nous devons nous adapter. Nous devons bâtir une Eglise sur la FOI. Nous savons désormais que nous serons une minorité. Il ne faut ni s’en étonner, ni s’en lamenter. J’ai une douce certitude que mon Seigneur est présent dans l’Europe actuelle. » Il faut bien se mettre devant l’évidence, l’avenir de l’Eglise ne se joue pas seulement dans nos assemblées dominicales, - actuellement réduites à la peau de chagrin - mais là où des hommes, des femmes et des jeunes osent encore prendre la parole pour renverser la machine à rendement, à fric et redonner toute sa place à la dignité et à la grandeur de tout Homme. 

 

L’Evangile de Jésus Christ, avec sa force de contestation, se révèlera toujours plus fort que toutes nos mesquineries, paresse, résignation ou nos manques de courage. 

« Jésus, passant au milieu d’eux, allait son chemin. »


François Prêtre retraité