lundi 26 juillet 2021

Le message du Père François

 Évangile de Jésus Christ selon St Jean 6 24–35

« En ce temps-là, quand la foule vit que Jésus n’était pas là, ni ses disciples, les gens montèrent dans les barques et se dirigèrent vers Capharnaüm à la recherche de Jésus. L’ayant trouvé sur l’autre rive, ils lui dirent : « Rabbi, quand es-tu arrivé ici ? » Jésus leur répondit : « Amen, amen, je vous le dis : vous me cherchez, non parce que vous avez vu des signes, mais parce que vous avez mangé de ces pains et que vous avez été rassasiés. Travaillez non pas pour la nourriture qui se perd, mais pour la nourriture qui demeure jusque dans la vie éternelle, celle que vous donnera le Fils de l’homme, lui que Dieu, le Père, a marqué de son sceau. » Ils lui dirent alors : « Que devons-nous faire pour travailler aux œuvres de Dieu ? » Jésus leur répondit : « L’œuvre de Dieu, c’est que vous croyiez en celui qu’il a envoyé. » Ils lui dirent alors : « Quel signe vas-tu accomplir pour que nous puissions le voir, et te croire ? Quelle œuvre vas-tu faire ? Au désert, nos pères ont mangé la manne ; comme dit l’Écriture : Il leur a donné à manger le pain venu du ciel. » Jésus leur répondit : « Amen, amen, je vous le dis : ce n’est pas Moïse qui vous a donné le pain venu du ciel ; c’est mon Père qui vous donne le vrai pain venu du ciel. Car le pain de Dieu, c’est celui qui descend du ciel et qui donne la vie au monde. » Ils lui dirent alors : « Seigneur, donne-nous toujours de ce pain-là. » Jésus leur répondit : « Moi, je suis le pain de la vie. Celui qui vient à moi n’aura jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura jamais soif. »



En parcourant cet évangile je pensais à cette brave maman, qui pour exprimer à son petit-fils la joie de le revoir, glissait un petit billet dans sa poche en signe de son affection. Geste, certainement pas anodin, avec cette arrière-pensée : il reviendra un peu plus souvent me voir ! Mais très vite elle sentit que ce signe n’était plus signe de rien du tout mais s’était transformé en habitude et même en dû. C’est elle qui était presque en dette vis-à-vis de son petit-fils. La preuve fut évidente, lorsqu’elle ralentit son geste, les visites ralentirent au même rythme.
Chers amis, personne n’échappe à ce phénomène et nous voyons qu’avec Jésus ce fut la même chose. Qu’est-ce qui faisait courir la foule derrière lui ? C’est parce qu’elle espérait obtenir du pain gratuitement, une guérison. Comme aujourd’hui qu’est ce qui fait courir les foules à Lourdes, Beauraing ou Banneux… n’est-ce pas ce secret espoir d’obtenir soit une guérison, une faveur, un avantage ?
Mais Jésus n’est pas dupe et il leur dit : « Vous me cherchez non pas parce que vous avez vu des signes mais parce que vous avez été rassasiés ». La foule n’a pas compris le signe, le message de Jésus, comme le petit fils n’a pas compris le signe, le message de sa bonne maman. C’est l’intérêt qui est devenu premier au détriment du signe que Jésus voulait révéler.
Or nous l’avons vu dimanche dernier, le signe du pain était le signe du partage qui produit l’abondance.
Nous aussi nous aimerions tant un Dieu qui satisferait nos appétits, comblerait nos manques. Qui ferait tomber la pluie là où nous voulons qu’elle tombe et briller le soleil là où nous le souhaitons. Qui écarterait la pandémie, la guerre, la famine, les catastrophes assez loin pour nous épargner. Comme on lit très peu ou pas du tout les Saintes Ecritures, on oublie le pouvoir que Dieu a donné aux Hommes : « Dominez la terre, maîtrisez-la ! »
Face à l’incompréhension de la foule, Jésus a préféré prendre une barque pour échapper à cette foule et marquer ainsi une rupture. Car Dieu, le Dieu de Jésus n’est pas à prendre comme on a un gros lot ou une assurance vie. Nul ne peut mettre la main dessus, aucun groupement, aucun parti, aucune religion et même aucune église ne peut dire nous le tenons, nous le possédons. A peine croit-on le saisir qu’il est déjà plus loin, il est toujours au-delà.
« Je suis le pain venu du ciel » dit-il. Il est le pain pour ceux qui marchent et non pour ceux qui s’arrêtent. Il est un pain que l’on partage et non pas un pain que l’on garde. Il est le pain de ceux qui cherchent et non de ceux qui possèdent. Il est le pain qui n’appartient à personne sinon à Dieu lui-même. Il est le pain qui comble une autre faim de l’homme.
En somme, Jésus nous révèle que l’être humain n’est pas une création du besoin et de la nécessité, mais une créature de désir, ouverte sur l’avenir. Il nous parle d’une nourriture dont le pain n’est que l’image. Il nous dit que l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de beauté, de création, d’amour, de gratuité, de vérité, de justice, de reconnaissance et de dignité. Avec beaucoup de délicatesse, il voudrait éveiller en nous cette faim-là. C’est bien pourquoi, lorsque nous le prions et lui demandons des choses, il nous donne quelqu’un, il se donne lui-même.
Mais comment aurions-nous encore faim de ce pain là si notre seul souhait est d’être comblé, de ne plus avoir faim de rien… ni de personne ?
François, prêtre retraité