vendredi 15 mai 2020

Le message du Père François


Évangile de Jésus-Christ selon St Jean 14 15–21
« En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements. Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous : l’Esprit de vérité, lui que le monde ne peut recevoir, car il ne le voit pas et ne le connaît pas ; vous, vous le connaissez, car il demeure auprès de vous, et il sera en vous. « Je ne vous laisserai pas orphelins, je reviens vers vous. D’ici peu de temps, le monde ne me verra plus, mais vous, vous me verrez vivant, et vous vivrez aussi. En ce jour-là, vous reconnaîtrez que je suis en mon Père, que vous êtes en moi, et moi en vous. Celui qui reçoit mes commandements et les garde, c’est celui-là qui m’aime ; et celui qui m’aime sera aimé de mon Père ; moi aussi, je l’aimerai, et je me manifesterai à lui. »


Méditation :
Au moment du départ d’un être cher, les relations sont mises à rudes épreuves. Vous l’avez sans doute déjà remarqué dans les aéroports, sur le quai des gares ou plus encore au chevet d’un mourant. Les sentiments de présence et d’absence se bousculent et s’embrouillent. Les visages sont attristés, les sourires un peu forcés, les yeux brillants de larmes qui coulent sur les joues.
On voudrait ne pas devoir se séparer. Le départ d’un être cher, quel qu’il soit est toujours difficile à accepter, car nous sommes faits pour vivre ensemble.
Il en va de même avec Jésus et ses disciples. C’est au soir du jeudi saint, au cours du dernier repas, partagé avec ses apôtres, que Jésus leur fait ses adieux et leur livre son testament.
Pour éviter les divisions et sauvegarder l’unité dans les familles, les parents ont pris l’habitude de rédiger un testament. Mais un testament essentiellement fondé sur le partage des biens matériels.
Le testament que Jésus lègue à ses apôtres est un testament spirituel. A l’image de son Père, Jésus demande aux apôtres et à nous aujourd’hui, à nous aimer les uns les autres comme lui nous a aimés. C’est le testament de l’Amour : il n’y a rien de plus beau que d’aimer et d’être aimé. C’est par l’Amour que nous sommes reliés à Dieu et à notre prochain. Quand on aime, on ne peut pas se contenter de belles paroles. Aimer demande à chaque instant, un engagement, une fidélité, un dépassement, un don de soi. C’est dans cet échange réciproque que grandissent la confiance, la joie et le vrai bonheur. Mais on peut aussi se laisser piéger par les apparences, qui bien souvent débouchent sur des déceptions et des découragements.
Jésus, en livrant son testament, veut donner à ses amis, les moyens indispensables pour tenir le cap, au milieu de tant de sollicitations. Son testament, Jésus l’adresse également à tous les chrétiens et à tous les hommes de bonne volonté. Mais c’est vrai aussi, qu’on est vite éloigné de l’essentiel. Pour ce faire, il est nécessaire de le vérifier dans la durée et dans la fidélité. Il en va de la crédibilité.
Le disciple de Jésus ne se singularise ni par son vêtement, ni par sa démarche, mais par sa façon d’être. Dans ses homélies de la messe du matin, le pape François insiste sur le témoignage que nous avons à donner aux hommes de ce temps. Témoignage oui, mais soutenu par la prière. C’est en cela qu’on reconnaît un chrétien.
Les chrétiens, ça existe. A quoi peut-on les reconnaître ? Quels sont leurs traits distinctifs ? Les textes de ce jour en énumèrent quelques uns. J’en retiendrai trois.
1.- Tout d’abord, la vie chrétienne est un agir.
La foi est première, bien sûr, comme l’amitié et l’amour. La foi s’exprime en conduites concrètes, visibles qui ne passent pas inaperçues, parce qu’elle met en œuvre l’Evangile dans le monde d’aujourd’hui. Quand le chrétien, dans sa vie, prend partie pour les plus pauvres, les sans voix, quand il prend la défense de tous ceux qui sont victimes d’injustices, quand il interpelle les puissants et les riches sur leur manière d’agir, de dominer les autres. Pas étonnant qu’il attire la méfiance, la haine et la vengeance, comme Jésus a attiré sur lui la haine et la vengeance des pharisiens de son temps. L’agir du chrétien est reconnaissable à sa façon d’être au milieu des autres, et non par prosélytisme. Jésus lui demande d’être « Sel et Lumière ».
2.- La vie chrétienne repose sur une conviction, née d’une expérience, d’une tradition, d’une histoire.
Des amis qui progressent, des époux qui grandissent, font l’expérience d’une vie nouvelle. De même, les chrétiens découvrent que Jésus est Vivant et qu’il a donné à chacun son Esprit : « Je ne vous laisse pas orphelins, je vous enverrai le Paraclet », le soutien qui vous fera souvenir les étapes importantes déjà parcourues et vous indiquera le chemin à poursuivre. La foi n’est certes pas démontrable (pas plus d’ailleurs que l’amour) ; elle est pourtant solide quand elle s’appuie sur les signes de Jésus ressuscité, qui donne sens à notre foi et à notre engagement.
3.- La vie chrétienne est aussi une vie liée à celle d’autres croyants.
Une amitié humaine ou un amour replié sur lui-même courent à leur perte. Un foyer qui ne serait centré que sur lui-même est un foyer en danger. Il ressemblerait à un feu qui brûle et qu’on n’alimente plus. Il finit par s’éteindre. Tous les couples ressentent bien que, pour que leur amour grandisse et s’épanouisse, ils ont besoin de s’ouvrir à d’autres, de se fréquenter, d’avoir eux-mêmes des couples amis ou bien de s’engager dans des associations et des Mouvements d’Action Catholique qui les aident à réfléchir. Ainsi en est-il du chrétien. Il n’est pas un isolé. La foi n’est pas son affaire à lui seulement. Personne ne découvre Jésus par lui-même, sans le concours d’autres chrétiens. Le chrétien a besoin de la communauté qui est l’Eglise.
La manière dont je vis en chrétien n’est-elle pas trop souvent une caricature, une trahison de Jésus et de son message ? On dit de belles paroles sans les mettre en application. Vivre l’Evangile au quotidien, n’est pas de tout repos. Cette fidélité à l’Esprit de Jésus exige de l’amour et du courage. C’est pour cela que Jésus nous envoie le Saint Esprit. Cette sensibilité à l’action de l’Esprit, loin de provoquer une évasion hors de nos tâches terrestres, ravivera en nous l’enthousiasme et le dynamisme pour nous engager à vivre selon son commandement d’amour.
Même si autour de nous le monde semble se désacraliser, nous pouvons être assurés que c’est d’abord au cœur de la tourmente que l’Esprit de Jésus surgit pour nous relever et nous faire croire à la vie.
Puissions-nous le mettre en œuvre avec la nouveauté que Dieu nous offre chaque jour.

François, prêtre retraité