DR
Évangile de Jésus Christ selon St Luc 18, 1-8
« Il leur raconta cette parabole pour dire qu’il faut prier sans cesse et ne pas se décourager : “Il y avait dans une ville un juge qui ne craignait pas Dieu et se moquait des gens. Dans cette même ville il y avait une veuve qui venait lui dire : ‘Rends la sentence contre mon adversaire.’
Tout un temps il refusa ; puis il se dit : "
Le Seigneur ajouta : “Écoutez bien ce qu’a dit ce juge très peu juste. Dieu ne fera-t-il pas justice à ses élus s’ils crient vers lui jour et nuit alors qu’il les fait attendre ! Je vous le dis : Il leur fera justice, et vite. Mais quand viendra le Fils de l’Homme, trouvera-t-il encore la foi sur la terre ? » (Bible des Peuples)
Devant tant de souffrances humaines, relatées quotidiennement par nos médias, beaucoup désespèrent et finissent par ne plus faire confiance aux grands principes de la vie en société : l’honnêteté, la justice, la droiture, la paix !
Il en va de même lorsque nous sommes confrontés à tant de personnes de notre entourage, atteintes de cancer, de divorces, d’échecs professionnels, d’accidents de route et de travail…..
Face à toutes ces situations, humainement on est sans perspectives, le désenchantement risque de nous envahir. Parce qu’on se sent démuni, on s’abandonne bien souvent au fatalisme.
Dans le contexte de la vie de nos contemporains, ce passage d’Evangile proposé aujourd’hui, tombe à pic. Et pourquoi ? Trois jours de deuil national ont été décrétés dimanche 9 octobre à la suite du violent ouragan Matthew qui s’est abattu sur le sud-ouest et le nord-ouest de l’île d’Haïti en milieu de semaine dernière. Huit ans après le tremblement de terre, cet ouragan aggrave encore la misère de ce peuple déjà durement éprouvé. Comme signe qu’ils sont encore vivants, il ne leur reste que leurs cris et leurs appels au secours.
La parabole de la pauvre veuve qui vient "casser la tête" d'un juge sans foi ni loi, nous rappelle cette autre histoire, de l’homme qui dort avec ses enfants, et que son voisin vient importuner en pleine nuit pour lui demander du pain. Dans les deux cas, Jésus nous redit : si des hommes sans cœur sont capables de céder à la demande de celui ou de celle qui leur "casse les pieds", à plus forte raison, votre Père accédera à votre demande, si vous ne vous lassez pas de le prier. Et il le fera "sans tarder". « Votre Père sait très bien de quoi vous avez besoin, avant votre demande. »
Pourtant, ce n'est pas ce que nous éprouvons lorsque nous sommes plongés dans l’épreuve. A ce moment-là, nous avons l’impression que Dieu est aux abonnés absents. Au point, que certains concluent à son inexistence. Nous comprenons que ce soit là une réaction toute humaine, mais Jésus vient nous parler du Père, qui est plein de tendresse et d’égards pour les hommes. Un Dieu qui n’hésite pas à faire tout ce qu’il peut, pour le bonheur de ses enfants. Et si nous faisons le constat opposé, c’est que ce message d’amour que Jésus est venu nous révéler, nous a tout à fait échappé. N’oublions pas que Dieu a donné aux hommes des capacités d’amour et d’intelligence, pour qu’ils puissent exister et se prendre en charge eux-mêmes. Il leur revient d’organiser et de prévoir l’accueil à la vie, le toit, la subsistance, l’éducation, la santé et une vieillesse digne.
La dimension politique doit prendre tous ces aspects en compte, sinon, c’est de la tromperie. Faut-il rappeler que le rôle essentiel de la politique, c’est d’organiser la société pour que chacun y trouve son compte. Et là, chacun doit aussi apporter sa part. Que ce soit dans les événements heureux ou malheureux.
En tant que croyants, nous pouvons y reconnaître l’amour de Dieu à l’œuvre. La prière, pour être vraie, s’adresse à Dieu avec tout ce que nous portons dans notre cœur. On ne peut pas lui demander de faire à notre place ce qui nous revient. Dieu ne se laisse pas enfermer dans nos demandes. S’il est plein de bonté et de miséricorde, il ne peut pas être la cause de nos malheurs. Dieu fait tout ce qui est en son pouvoir pour le bonheur de ses enfants. Jésus nous présente toujours Dieu comme un Père qui met en valeur tout ce qui est humain : nos relations, notre estime et notre dignité.
Combien de chrétiens utilisent les paroles de Jésus sans se rendre compte qu’elles concernent notre existence.
Lorsque nous disons que Dieu est tout puissant, nous le réduisons trop souvent à une forme de technique ou de magie, qui relève plus de la domination que de l’harmonie et de la fraternité. Jésus est venu pour témoigner que Dieu nous aime et il reste fidèle à sa mission en allant jusqu’à la mort sur la croix. Sa confiance au Père, le conduira à la résurrection, à une vie nouvelle. Cette foi, en la Résurrection, mérite d’être transmise à tous ceux qui veulent bien l’accueillir.
Une foi vivante doit faire bouger notre agir. Comme le dit St Paul dans sa lettre à Timothée : “enseigne, dénonce le mal, redresse, éduque dans la justice…”. La prière de foi n’est pas un doux oreiller, pour rêver d’un monde nouveau, elle a des exigences liées à notre existence.
François, prêtre retraité