dimanche 14 septembre 2014

Destins croisés des Mosellans et Charentais dans la guerre de 1939/1945

L’Association «Confluence» de Sarreguemines, présidée Jean-Claude Peltre, a invité pour le 75 ème anniversaire  de l’évacuation Jacques Baudet, historien charentais. 

C’est un public très attentif qui a suivi la conférence de Jacques Baudet, historien, Charentais et Mosellan par des attaches familiales au Bitcherland, chancelier de l’Académie d’Angoumois. Dans son exposé , il a d’abord expliqué  cette rencontre historique entre Charentais et Mosellans suite à l’évacuation des Mosellans au début de septembre 1939.

Transport en wagons à bestiaux

Les Lorrains, transportés dans des wagons à bestiaux, 

arrivaient en gare d’Angoulême. C’était le rôle de l’administration de les répartir dans les différents villages où tous les logements vides avaient été réquisitionnés. Les maires  et leur secrétaire de mairie-instituteur, ainsi que les curés mosellans se sont beaucoup occupés des réfugiés. Alors que le maire Nicolas Nilkaus de Sarreguemines s’est beaucoup investi, le maire Achille  Taglang de Volmunster n’a pas accompagné ses administrés  à Sigogne. Alors que les ruraux s’habituèrent rapidement aux logements sans confort, les citadins eurent beaucoup plus de mal. Toutefois, ce qui choqua le plus les Mosellanes, c’est le retour de la cuisine dans la cheminée. Très rapidement, ils ont acheté des fourneaux de fortune qu’on appela, le «Charenter Èwel» Alors que tout le monde toucha une indemnité de 10 F par jour et par personne, très rapidement les Lorrains ne pouvant pas rester oisifs ont cherché à aider dans la culture ou sont allés travailler à l’usine.

Arrivée des Allemands

Quand les Allemands sont arrivés en Charente, ils ont demandé aux évacués à retourner chez eux. Ceux qui sont rentrés au Bitcherland, furent spoliés et  expulsés dans le Saulnois  par l’administration militaire allemande en raison de l’agrandissement du camp militaire de Bitche. Certains furent refoulés à Saint-Dizier, d’autres sont restés en Charente, et particulièrement une centaine d’habitants de Volmunster qui ont suivi les recommandations de leur  curé Charles Humbert, et ont refusé la germanisation. Ces «restés» ont été très surveillés par les Allemands et ont été souvent convoqués à la «Kommandatur». Ils ne sont rentrés en Lorraine que le 1  er avril 1946. 

Des Mosellans dans la résistance charentaise

Certains d’entre eux, tels Charles Rechenmann, chef de réseau  et le couple Muller de Sarreguemines, le Père Augustin, Bernard Fischer, instituteur de Barbezieux, etc. se sont engagés dans les mouvements de la résistance charentaise au risque d’y laisser leurs vies. Certains seront arrêtés par la S.I.P.O (Sicherheitspoilizei, la police de sûreté allemande), et envoyés dans les camps de concentration. 

Il évoqua particulièrement le rôle important du  Père Augustin, né Antoine Meyer, du couvent de Bitche. Il a été mobilisé le 22 août 1939 comme caporal. Il encadre l’évacuation des hôpitaux de Bitche et Sarreguemines sur Cognac le 25 août 1939. Aumônier des réfugiés à Cognac. Retour à Bitche le 14 octobre 1940. Expulsé avec les capucins du couvent de Bitche. Rejoint Cognac le 13 juin 1941. Aumônier des Lorrains restés en Charente qu’il réunit régulièrement à l’abbaye de Bassac et à l’église de Sigogne. En contact avec la résistance charentaise,   avec la complicité d’Élise Hasselwander, originaire de Volmunster, secrétaire à la mairie de Jarnac il procure des faux papiers aux réfractaires de la RAD et des STO Il est arrêté le 28 décembre 1943 à Paris. Il est interné à la prison de St Roch à Angoulême, puis à Poitiers. Transféré à Compiègne. Déporté le 4 juin au camp de concentration de Neuengamme, il travaille dans le commando de Watenstedt pour les usines H. Göring. Lors de l’évacuation du commando, il meurt le 7 avril 1945 dans un wagon, écrasé par les autres déportés. Il est enterré le lendemain lors d’une halte le long de la voie ferrée entre Wittenberg et Hagenow. Une rue de Cognac porte son nom.

Joseph Antoine Sprunck