mercredi 2 février 2022

Le message du Père François

 Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 5, 1-11

« En ce temps-là, la foule se pressait autour de Jésus pour écouter la parole de Dieu, tandis qu’il se tenait au bord du lac de Génésareth. Il vit deux barques qui se trouvaient au bord du lac ; les pêcheurs en étaient descendus et lavaient leurs filets. Jésus monta dans une des barques qui appartenait à Simon, et lui demanda de s’écarter un peu du rivage. Puis il s’assit et, de la barque, il enseignait les foules. Quand il eut fini de parler, il dit à Simon : « Avance au large, et jetez vos filets pour la pêche. » Simon lui répondit : « Maître, nous avons peiné toute la nuit sans rien prendre ; mais, sur ta parole, je vais jeter les filets. » Et l’ayant fait, ils capturèrent une telle quantité de poissons que leurs filets allaient se déchirer. Ils firent signe à leurs compagnons de l’autre barque de venir les aider. Ceux-ci vinrent, et ils remplirent les deux barques, à tel point qu’elles enfonçaient. À cette vue, Simon Pierre tomba aux genoux de Jésus, en disant : « Éloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur. » En effet, un grand effroi l’avait saisi, lui et tous ceux qui étaient avec lui, devant la quantité de poissons qu’ils avaient pêchés ; et de même Jacques et Jean, fils de Zébédée, les associés de Simon. Jésus dit à Simon : « Sois sans crainte, désormais ce sont des hommes que tu prendras. » Alors ils ramenèrent les barques au rivage et, laissant tout, ils le suivirent. »

 

Permettez-moi d’exprimer, à la fois, mon émerveillement devant « Cette foule qui se pressait autour de Jésus pour écouter la parole de Dieu », et ma question : comment se fait-il que cette même Parole qui a suscité tant d’élan, tant de déplacements de foules n’a plus cette même emprise sur les chrétiens de nos régions qui désertent nos Eglises ? Nous vivons certainement un tournant important dans notre histoire chrétienne, comme celui « du vivre ensemble » ou encore de la politique et de l’économie. Ce n’est plus comme avant !


Photo DR

 

Pourtant nous avons connu un « souffle divin » lorsque le St pape Jean XXIII a ouvert le Concile Vatican II en reprenant les paroles de cet évangile : « Avance vers le large et jetez vos filets pour la pêche. » En d’autres termes, le pape avait conscience que l’Eglise était enfermée dans les coutumes et les contraintes du passé. Alors il invite tous les chrétiens à se mobiliser autour de la vie des Hommes de ce temps. C’est l’heure de l’audace, de la mission et de l’action.

Comme au temps de Jésus, au temps du Saint pape Jean XXIII, de même qu’aujourd’hui, Dieu n’a pas besoin « d’adorateurs », mais des prophètes qui mettent son message, sa Bonne Nouvelle à la portée du tout-venant. Jésus s’est fait serviteur de ses frères et non maître de la loi.

 

Rejeté à Nazareth par les siens, Jésus s’en va au carrefour des nations, à savoir Capharnaüm. Il vient là, où les gens vivent, travaillent, se rencontrent, se croisent, échangent, font du commerce. Et là, l’évangéliste Luc souligne deux points essentiels : « il les instruit et il les renvoie à nouveau à la pêche ». 

 

Jésus tient un langage simple, se servant bien souvent des paraboles tirées de la vie des gens de son époque. Et à partir de leur savoir-faire, de leur connaissance, mais aussi de ce qu’ils vivent de difficile, Jésus veut leur faire découvrir qu’ils vivent déjà quelque chose de ce Royaume qu’il leur enseigne : « Le Royaume de Dieu est déjà au milieu de vous. »

 

De même, l’Eglise conciliaire a organisé sa recherche et son approfondissement pour être accueillante et respectueuse de la vie des gens. C’est bien dans l’aujourd’hui de cette vie que se construit le Royaume de Dieu. Voici 60 ans au temps du Concile, les mouvements d’Action Catholique ont été sollicités pour témoigner de leur expérience et de leur savoir-faire dans l’articulation entre la vie et la foi chrétienne : « Voir – Juger –Agir ».




A l’époque de Jésus, comme à l’époque du Concile, comme aujourd’hui, un certain nombre de gens refusent de se laisser enfermer dans une forme de religion « mystico-gélatineuse » où un« cléricalisme qui n’a rien à faire avec le christianisme », tient à souligner le pape François. Jésus lui-même refusait les enfermements. C’est pourquoi, certains de ses compatriotes étaient même prêts à le lyncher.



 

La même question se pose aujourd’hui. Un grand nombre de gens en responsabilité : politiques, économiques, scientifiques ont quitté ostensiblement leurs liens avec l’Eglise Catholique. Combien de jeunes couples et la masse des ados refusent de se laisser embrigader dans des façons de faire, de croire qui ont pu nous paraître évidentes à une époque plus ancienne. Et pourtant, tant de jeunes se retrouvent dans les rencontres internationales des JMJ (Mouvement Mondial de la Jeunesse) – comme dans les rassemblements des Jeunes à Taizé. Ils ont soif d’adapter la Bonne Nouvelle dans la nouveauté de leur vie. Saurons-nous leur proposer des moyens de rebondir et de grandir en humanité et dans leur foi. C’est bien en cela, que l’Evangile est toujours d’actualité. 

 

L’Eglise d’aujourd’hui s’inscrit dans la fidélité à Jésus. « Exposant ses idées pour l’Eglise de demain, le Pape François demande que « l’Eglise se sente responsable des âmes mais aussi des corps ». Il souligne que « dans la société et dans le monde où nous vivons, l’égoïsme a pris le dessus sur l’amour pour les autres », et que c’est pour cela que « les hommes de bonne volonté doivent travailler, chacun avec ses propres forces et compétences pour faire que l’amour du prochain augmente jusqu’à faire jeu égal et si possible dépasser l’amour pour soi-même ».

 

L’Eglise nous invite, comme St Luc, à former notre conscience aux saveurs du Royaume et la mettre en œuvre dans ce que nous connaissons le mieux. Osons le large, soyons des chrétiens accueillants, respectueux, attentifs aux signes que Dieu nous donne en ce temps. Ces qualités humaines sont la base, le socle, le terreau sur lequel l’Esprit de Dieu peut faire grandir notre foi. Alors prenons soin de ces qualités indispensables au Royaume.


François, prêtre retraité