vendredi 18 juin 2021

Le message du Père François

 Évangile de Jésus Christ selon saint Marc (4, 35-41)

« Toute la journée, Jésus avait parlé à la foule. Le soir venu, Jésus dit à ses disciples : « Passons sur l’autre rive. » Quittant la foule, ils emmenèrent Jésus, comme il était, dans la barque, et d’autres barques l’accompagnaient. Survient une violente tempête. Les vagues se jetaient sur la barque, si bien que déjà elle se remplissait. Lui dormait sur le coussin à l’arrière. Les disciples le réveillent et lui disent : « Maître, nous sommes perdus; cela ne te fait rien? » Réveillé, il menaça le vent et dit à la mer : « Silence, tais-toi! » Le vent tomba, et il se fit un grand calme. Jésus leur dit : « Pourquoi êtes-vous si craintifs ? N’avez-vous pas encore la foi ? » Saisis d’une grande crainte, ils se disaient entre eux : « Qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer lui obéissent ? »
« Maître, nous sommes perdus, cela ne te fait rien?"
Ce cri des apôtres, affolés par la tempête, en direction de Jésus qui dort tranquillement au fond de la barque, pourrait être le nôtre aujourd'hui:
- Dieu, créateur de l’univers, tu as fait la planète Terre, si belle et harmonieuse d'équilibre et de beauté. Aujourd’hui elle est menacée. Vas-tu laisser se dégrader une œuvre aussi magnifique et riche de promesses ?
- Dieu qui a créé l’Homme à son image, ne vois-tu pas ces milliers de gens qui meurent de faim, qui sont torturés et massacrés, qui périssent dans des catastrophes naturelles, mais aussi les immigrés jetés dans la mer. Pourrais-tu rester indifférent à tant de gâchis, alors que tu ne cesses de manifester ton amour à tous les hommes ?
- Christ, ton Eglise connaît une hémorragie de fidèles, de prêtres et de religieux qui ont du mal à se renouveler et se font rares. Il te suffirait d'un souffle pour que le dynamisme et la vitalité de la foi se réveillent et lui donnent un nouvel élan. Apparemment, tu ne fais rien !
NON, le Seigneur ne va pas dissoudre le CO2 qui réchauffe notre planète par miracle ! De même, qu’il ne va pas fertiliser et arroser la terre du Sahel. Il ne va pas non plus arrêter les bras armés qui tuent. Ni stopper cette pandémie qui a causé tant de morts de par le monde. Ça pourrait être un beau rêve qui nous arrange, mais ce n’est pas la façon d’agir de Dieu.
Dieu nous a confié la PLANÈTE comme il nous a confié nos frères. "Dominez la terre, soumettez-la ". En d'autres termes, organisez la terre et les peuples de telle façon que chaque homme soit respecté dans sa race, sa religion, sa culture. Il importe que chacun puisse contribuer avec son cœur, son intelligence et la force de ses bras à l'édification d’une société plus juste et plus fraternelle. Le soleil ne brille-t-il pas pour tous les hommes ? Est-ce que Dieu ne donne pas la chance à chacun de découvrir un peu de bonheur qui puisse lui réchauffer le
cœur ?
Avec cette terre et l’univers, Dieu a donné tout ce qu’il fallait pour qu'elle puisse se développer et porter de bons fruits. Il a donné à l'homme assez d'intelligence et de cœur pour comprendre et être acteur de son avenir. Dieu n'est pas du genre à faire une O.P.A. sur la gestion qu'il nous a confiée.
Pour nous aider à mieux comprendre ce qui s’est passé sur le lac de Tibériade ce jour-là, St Marc nous livre deux symboles : « Passons sur l’autre rive » et la « mer déchainée ». L’un est choisi, l’autre est subi. Cette autre rive, ce n'est pas seulement l'autre côté du lac ; c'est aussi celle du monde païen. Jésus veut le rejoindre pour lui annoncer la Bonne Nouvelle de l'Évangile. Il veut manifester la dimension universelle de sa mission.
D’autre part, dans le monde de la Bible, la mer : c'est le repère des démons et des forces du mal. Au temps de Jésus, on croyait que les puissances du mal et de la mort habitaient le fond de la mer. On craignait les eaux et la mer agitées. C'est dans ce contexte que se déroule le récit de l’évangile.
Ce qui intéresse St Marc, ce n’est pas l’aspect spectaculaire de la tempête apaisée mais la question que Jésus pose à ses disciples : « Comment se fait-il que vous n'ayez pas la foi ? » Cette même interpellation, Jésus l’adresse à nous aujourd’hui. Comme les apôtres nous réagissons avec nos peurs, nos angoisses quand nous sommes affrontés aux multiples brutalités de la vie. Tous les jours, les journaux, la radio et la télévision nous parlent de la crise, du chômage, de la précarité et des violences de toutes sortes. Par ailleurs, le moment est bien choisi pour remettre au goût du jour la réforme des retraites, au moment où les ouvriers s’octroient quelques jours de vacances.
L'Église, elle aussi, comme la société des hommes, n’est pas épargnée, souvent elle est critiquée, ridiculisée ou incomprise pour de multiples raisons.
Il en est de même dans nos vies : nous traversons des tempêtes et pourtant Dieu est là, à nos côtés. Nous avons des besoins profonds : besoin de sens à donner à notre vie, de paix intérieure, d'amour sans limite, de vie pleine qui dure toujours. Les bons sentiments, ça nous connait, mais à la première épreuve : maladies, deuils, difficultés de toutes sortes, nous risquons de flancher et même de tout remettre en question. Comme les disciples, notre foi n’est pas assez ancrée dans la confiance en Dieu.



La barque dans la tempête n'est pas qu'un simple épisode. C'est une image de notre vie et de notre foi. C'est une image qui illustre aussi le sort de l'Église, les dangers qu'elle traverse et le secours que Jésus lui apporte. La barque de l'Eglise peut être menacée, malmenée. Elle arrivera à bon port si elle est guidée, animée par l’Esprit de la Pentecôte. Cet Esprit travaille le cœur de tant d'hommes et de femmes pour ramer, écoper, travailler, prier, croire et espérer. Gardons bien vivante cette flamme de l’Esprit qui nous habite.

François, prêtre retraité.