mercredi 24 février 2021

Le message du Père François

« En ce temps-là, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean, et les emmena, eux seuls, à l’écart sur une haute montagne. Et il fut transfiguré devant eux. Ses vêtements devinrent resplendissants, d’une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille. Élie leur apparut avec Moïse, et tous deux s’entretenaient avec Jésus. Pierre alors prend la parole et dit à Jésus : « Rabbi, il est bon que nous soyons ici! Dressons donc trois tentes : une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. » De fait, Pierre ne savait que dire, tant leur frayeur était grande. Survint une nuée qui les couvrit de son ombre, et de la nuée une voix se fit entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé : écoutez-le! » Soudain, regardant tout autour, ils ne virent plus que Jésus seul avec eux. Ils descendirent de la montagne, et Jésus leur ordonna de ne raconter à personne ce qu’ils avaient vu, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts. Et ils restèrent fermement attachés à cette parole, tout en se demandant entre eux ce que voulait dire : « ressusciter d’entre les morts ».



Tous les jours nous avons droit à des commentaires, parfois contradictoires, sur le virus et sa contamination aux variants. A force de rabâcher, les gens sont fatigués et ça joue sur leur moral. Ces dernières semaines on a souligné que les Français étaient devenus les champions du pessimisme depuis cette pandémie. On peut énumérer les difficultés à venir qui paraissent insurmontables : les magasins qui mettent la clé sous le paillasson, le nombre croissant des chômeurs, les fermetures d’entreprises, réduction d’emplois dans les services publics, les étudiants sont dans l’expectative et attendent de quoi sera fait demain ! Chacun a de quoi allonger la liste.
Est-ce que l’Evangile que nous venons d’entendre, n’a pas ses racines plantées dans un terrain semblable ? Devant ces foules désorientées, écrasées qui cherchent des solutions, il y a de quoi s’user, se fatiguer et désespérer. Alors, « Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean, et les emmène, eux seuls, à l’écart sur une haute montagne. Et il fut transfiguré devant eux. »
Nous connaissons tous des visages qui redonnent confiance, qu’ils soient jeunes ou adultes, souffrants ou déformés, élégants ou difformes, qui rayonnent d’indicible beauté. Ils disent mieux que tous les mots et les discours : la richesse intérieure, l’amitié, la chaleur, la lumière. On se sent bien en leur compagnie et on souhaite que cela puisse durer. Cette expérience nous l’avons vécue comme bénévoles et aumônier auprès de nos frères handicapés.
Un visage et un regard suffisent parfois - souvent - à fonder l’aventure d’une vie sur un amour partagé avant les premiers échanges et les premiers projets.
Les disciples voient, lors de la transfiguration, le visage de Jésus brillant comme le soleil. Leurs mots, sans doute, sont impuissants à décrire vraiment ce qu’il leur est donné de voir, car ils quittent un instant le monde des hommes et de la terre qui leur colle à la peau, pour entrer dans le monde de Dieu, la terre promise à tous les élus. Visage de Jésus, visage rayonnant d’un Dieu épris de l’homme.
En un éclair, les trois disciples privilégiés - Pierre, Jacques et Jean - voient, l’Ancien et le Nouveau Testament réunis. Dans la rencontre de Jésus avec Moïse et Elie, ils comprennent que Jésus, leur ami, se situe dans la tradition de la loi et des prophètes. Dans cette symphonie de lumière et de blancheur, ils soupçonnent un monde nouveau. Ils s’en souviendront aux heures sombres du doute, de l’incompréhension, de la croix, de la mort. Dans la nuée, ils approchent la vérité de Dieu et de son amour sans limites. Cette vision est un moment exceptionnel. Chacun peut avoir la grâce d’en être illuminé. Ce sont des moments forts et rares qui méritent qu’on s’en souvienne, parce qu’ils seront essentiels dans les moments difficiles. Ces moments de lucidité ont aidé Jésus dans les moments difficiles d’affrontements, de contestations sur le chemin qui va le conduire à la mort. Sans ces temps forts, si nécessaires à notre vie, la vie perd son goût, sa saveur, son sens : à quoi bon vivre !
« Jésus leur défendit de ne raconter à personne ce qu’ils avaient vu avant que le Fils de l’Homme soit ressuscité d’entre les morts. » Au stade où ils en étaient, les apôtres ne pouvaient pas comprendre la signification de cette vision. Après les événements de la mort et de la résurrection, ils se rappelleront que Jésus leur avait annoncé sa résurrection. Ne sommes-nous pas dans la même situation que les apôtres devant les épreuves qui nous tombent dessus ? C’est en faisant la relecture de notre vie, que nous pouvons décrypter, comprendre, approcher d’une façon nouvelle le mystère de Dieu présent à notre existence. Pour cela, il faut prendre les moyens.
En ce temps de carême des chrétiens se retrouvent pour réfléchir sur l’actualité de la Bonne Nouvelle. L’Eglise, en proposant ces 40 jours de carême tous les ans, a conscience de l’évolution de la vie et de la société. C’est pourquoi, chacun est appelé à se renouveler sérieusement, non pas pour faire semblant mais pour toucher les questions essentielles de la vie d’aujourd’hui.
Il y a des lieux concrets où nous vivons, où nous sommes engagés, où nous réagissons : dans nos familles, nos quartiers, nos lieux de travail, la rue, la voiture, l’école, les associations. C’est dans ces lieux bien concrets, si nous voulons bien l’écouter, que Dieu nous interpelle sur notre façon de vivre et de nous comporter.
Quoiqu’il arrive, Dieu nous aime, il ne revient pas en arrière et il a besoin de chacun pour que grandissent la paix, la justice, le respect, en un mot son Royaume ! Puissions-nous entendre, reconnaître et mettre en œuvre ce message du Père : « Tu es mon Fils bien-aimé en qui j’ai mis tout mon amour » !

François, Prêtre retraité