Évangile de Jésus-Christ selon St Matthieu 18 15–20
« En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui faire des reproches seul à seul. S’il t’écoute, tu as gagné ton frère. S’il ne t’écoute pas, prends en plus avec toi une ou deux personnes afin que toute l’affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins. S’il refuse de les écouter, dis-le à l’assemblée de l’Église ; s’il refuse encore d’écouter l’Église, considère-le comme un païen et un publicain. Amen, je vous le dis : tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous aurez délié sur la terre sera délié dans le ciel. Et pareillement, amen, je vous le dis, si deux d’entre vous sur la terre se mettent d’accord pour demander quoi que ce soit, ils l’obtiendront de mon Père qui est aux cieux. En effet, quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux. »
L’ensemble des évangiles met en valeur la rencontre et rejette l’intolérance. Jésus va à la rencontre des hommes de son temps. Quels qu'ils soient, l’annonce du Royaume leur est destinée. Jésus ne fait pas de différence entre les bons et les mauvais, car pour Jésus, chacun est capable de se convertir et de progresser.
C’est dans cet esprit que le Pape François rappelle que suivre le Christ : c’est construire « des ponts et non pas des murs » ! Ça veut dire, qu’il y a un travail important à faire pour que se réalise les plus beaux projets : dialogue, compréhension, mise en commun pour la mise en œuvre. Il n’y a que la pluie et les rayons du soleil qui tombent du ciel sans effort de notre part. La construction du Royaume de Dieu, comme la construction d’un pont, n’est pas le fruit du hasard, mais de ceux qui se laissent travailler par l’Esprit de Dieu.
Le plus beau cadeau que Dieu nous fait, c’est la confiance qu’il fait à chacun, malgré ses limites et ses fragilités, et cela sans conditions. Dieu aime chacun PAR – DON ! Le PAR signifie, le chemin par lequel nous arrive la nouveauté que Dieu nous propose : le PARDON.
Le pardon ne peut pas s’enfermer dans une comptabilité. L’occasion du pardon a comme première conséquence : restaurer les relations. Mais c’est aussi l’occasion de mettre en valeur et de renouveler la confiance et l’amour réciproque. Pour qu’un couple dure, il est important de gérer le quotidien avec ses incompréhensions et ses malentendus. Ce qui est le plus important, c’est que l’amour réciproque se renouvelle et donne à chacun des forces nouvelles.
Dans l'Évangile, Jésus nous démontre à quel point il nous aime. Le texte d’aujourd’hui est un appel à l’amour et à l’action. C’est le contraire de l’intolérance. Or concrètement aujourd’hui, face à tous les crimes et barbaries de notre époque, la première réaction, liée à l’instinct de survie, c’est de se venger. Mais l’expérience et la réflexion nous montrent, que la vengeance ne fait qu’aggraver le mal.
Concrètement, la vie est aussi faite de petits drames qui empoisonnent notre existence et notre quotidien. Il faut choisir entre le langage de l'accusation qui divise et le langage du pardon qui resserre les liens de l'unité. Un foyer uni, une famille soudée, une communauté fraternelle, c'est là où l'on pardonne. N'allons pas chercher ailleurs le secret du bonheur. Il est dans des relations harmonieuses qui pardonnent et dépassent toutes les égratignures relationnelles. Demander le pardon, c’est vouloir s’excuser des erreurs du passé. Accorder le pardon, c’est croire en l’avenir. Il faut savoir vivre en communauté et savoir faire des concessions. Pardonner, c’est reconnaître ses propres limites sans enfermer les autres dans leurs limites. Pardonner, c’est refuser de se venger, mais c’est chercher ensemble un chemin de conciliation et de réconciliation.
Le pardon n’est pas toujours facile à demander, et il n’est pas plus aisé à donner. La loi de Dieu, c'est la loi de la démesure de l'amour, le règne de la patience, du pardon et de la miséricorde. Le regard d'amour est plus fort que le regard punitif. Cela devrait être ainsi pour le chrétien. Retenir la vengeance comme solution divise et provoque des ruptures. Opter pour le pardon, ça crée des ponts de solidarité. Dans tous les conflits entre les personnes et les peuples, le dialogue est primordial. Il est évident que tout ne se règle pas entre deux personnes. Dans l’Evangile, Jésus demande d’associer : « une ou deux personnes. Et si ça ne suffit pas, faire appel à l’ensemble. » Personne n’est juge par lui-même. Mais chacun est capable d’aimer et d’apporter le meilleur de lui-même.
Quand Jésus invite à se retrouver avec son frère, avec les autres, ce n’est pas pour organiser un racket, mais pour travailler à la Justice et à la Vérité. Chacun est invité à apporter sa part de bonheur à tous ceux qui sont engagés dans la vie avec lui. Il ne faut surtout pas oublier, que la priorité va vers ceux qui peinent et qui sont souvent les premiers oubliés. C’est dans cette inspiration que l’Esprit de Dieu est à l’action. C’est seulement là qu’on peut retrouver la bonne volonté de ceux qui le suivent. Et comme le dit Jésus : « .tout ce que vous liez ici sur terre sera lié dans le ciel, et ce que vous déliez sur la terre sera délié dans le ciel. » Ainsi Jésus fait appel à la liberté et à la réconciliation de chacun, pour apporter sa part dans la construction d’un monde de paix, de justice et d’amour.
François, prêtre retraité