En 1941, l’Etat allemand a créé une ferme d’Etat sur les terres des paysans d’Ormersviller et d’Epping transplantés dans le Saulnois pour y gérer les fermes appartenant à des fermiers indésirables.
A la demande expresse des Allemands, les habitants évacués en Charente reviennent en septembre 1940. Aussitôt, ils réparent les toits et les fenêtres avec des cartons ou des planches. Ils récupèrent des poêles dans des abris dans les champs. Les jeunes se font embaucher en Allemagne dans les entreprises chargées de réparer les maisons. Certains y empruntent des chevaux pour ensemencer le blé.
Création d’un grand camp militaire
Des paysans francophiles ou francophones du Saulnois, jugés « indésirables », sont expulsés entre le 11 et le 28 novembre 1940. Les 9 000 habitants de 18 communes du Bitcherland vont les remplacer en partie.
Ce sont les militaires allemands, accompagnés de gendarmes qui vont transplanter toutes les familles dans le Saulnois et la région de Metz où ils remplacent les familles expulsées dans la région lyonnaise. Après le départ des habitants des 18 communes, une ferme d’Etat est créée à Ormersviller. Un Bauersiedler allemand est chargé de la gérer et de diriger 50 prisonniers russes et plusieurs familles ukrainiennes et polonaises. Des paysans d’Epping et d’Ormersviller encadrent les prisonniers lors des travaux. Ces paysans habitent leur maison, mais doivent payer un loyer à l’armée.
Seulement six mois d’entraînement
Du moment que les 18 communes du no man's land ont été rattachées au camp de Bitche, l’armée est propriétaire de toutes les terres et maisons. Les gendarmes sont chargés de surveiller les villages. Des sentinelles sont placées sur des différentes routes d’accès. Des entraînements se font seulement les six premiers mois. De nombreux bergers allemands sont autorisés à faire brouter leurs moutons dans les prés. Chaque berger garde environ 1 000 moutons. Ils sont disséminés dans les prés des autres villages du camp.
Une ferme très importante
La ferme d’Etat de 500 ha d’Ormersviller est une ferme d’exploitation agricole et de jardin botanique, dirigé par un Bauerführer. On y cultive des céréales, des pommes de terre, des betteraves, des choux et des légumes. Dans le jardin botanique poussent du chanvre, du lin, du pavot et toutes sortes de plantes médicinales. Pour les travaux des champs , il y a 50 prisonniers russes, 30 chevaux, quatre tracteurs, 4 boeufs. Le lait des 25 vaches est livré à Brenschelbach distant de 3 km du village.
La moisson avec des moissonneuses lieuses
La récolte de 1944 est transportée directement à la gare de Brenschelbach. Les prisonniers russes sont emmenés fin septembre en Allemagne et notre Bauerführer reste tout seul avec les familles polonaises. Il quittera Ormersviller fin novembre. Lors des combats en mars 1945, le village sera bombardé, mais libéré le 16 mars 1945.
Retour des habitants
Seuls les habitants dont les maisons ne sont pas détruites ont le droit de rentrer en 1945. Les autres devront attendre la construction par l’Etat des baraquements pour les familles, mais aussi pour le bétail. Comme les Allemands ont emmené en septembre 1944 les bovins et les chevaux, l’Etat français réussira à récupérer une bonne partie pour les redistribuer aux paysans à la gare de Petit-Réderching. Comme tous les câbles électriques ont été récupérés par les Allemands dans les villages expulsés, tous devront utiliser pendant plusieurs mois les lampes à pétrole pour s’éclairer. « C’est difficile pour recommencer à zéro, mais nous avons réussi à survivre lors de cette guerre, de plus mes deux fils sont rentrés. Hélas deux familles ont été durement frappées. L’une a perdu quatre fils et l’autre trois. » nous confie un habitant d’Ormersviller.
Joseph Antoine Sprunck