lundi 5 août 2019

Le message du Père François

Évangile de Jésus Christ selon St Luc 12 13–21

« En ce temps-là, du milieu de la foule, quelqu’un demanda à Jésus : « Maître, dis à mon frère de partager avec moi notre héritage. » Jésus lui répondit : « Homme, qui donc m’a établi pour être votre juge ou l’arbitre de vos partages ? » Puis, s’adressant à tous : « Gardez-vous bien de toute avidité, car la vie de quelqu’un, même dans l’abondance, ne dépend pas de ce qu’il possède. » Et il leur dit cette parabole : « Il y avait un homme riche, dont le  domaine avait bien rapporté. Il se demandait : “Que vais-je faire ? Car je n’ai pas de place pour mettre ma récolte.” Puis il se dit : “Voici ce que je vais faire : je vais démolir mes greniers, j’en construirai de plus grands et j’y mettrai tout mon blé et tous mes biens. Alors je me dirai à moi-même : Te voilà donc avec de nombreux biens à ta disposition, pour de nombreuses années. Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence.” Mais Dieu lui dit : “Tu es fou : cette nuit même, on va te redemander ta vie. Et ce que tu auras accumulé, qui l’aura ?” Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même, au lieu d’être riche en vue de Dieu. »

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Un homme vient trouver Jésus, et il lui demande de régler son  problème d'héritage. Cette question est toujours d’actualité, car les héritages sont très souvent occasion de jalousies, de rivalités farouches et de divisions dans les familles. Lorsqu’on  me dit : « nous sommes une famille unie », je réponds par la question : «avez-vous déjà fait le partage ?» Ça entraîne des sourires mais aussi des incertitudes. 

Jésus n'entre pas dans le jeu proposé par l’homme qui l’interroge. En dénonçant l'âpreté au gain, il élève le débat vers le véritable héritage à espérer, l'héritage de l'éternité.
Depuis Jésus, les choses ont bien changé. Aujourd’hui on parle facilement de capitaliser. Les journaux nous rabâchent ce que nos responsables de la société nous font miroiter: «Economisez, mettez de côté pour votre retraite, capitalisez, placez votre argent en Sicav, sachez payer moins d'impôts, boursicotez. » Comme si le paradis et la réussite de la vie humaine passaient par la star-ut, les stock‑options et  les "affaires"... Mais il faut surtout,  ne pas se faire attraper pour nos magouilles. 

A l’inverse, l’Évangile nous dit: Ne faites pas comme ce cultivateur qui amasse et meurt sur un matelas de billets. A quoi bon capitaliser excessivement! En effet:
‑ Vous dépenserez souvent une énergie pour rien: ainsi 70 milliards s'envolent en fumée dans les jeux d'argent.
‑ Vous serez tentés alors d'en vouloir toujours plus... vous serez peut‑être tentés aussi par la corruption.
‑ Vous ne dormirez pas tranquilles: réalisez‑vous les soucis de ces 300 milliardaires de par le monde ? Ne sont‑ils pas à plaindre ?
‑ Vous n'emporterez pas votre argent: "Le linceul n'a pas de poche" et on n'a jamais vu un coffre-fort suivre un corbillard!

Par contre nous dit l’évangile de ce jour, soyez riches en vue de Dieu. Pensez à long terme. Prévoyez une perspective de vie éternelle. Mais comment?
De la part de Dieu,  Jésus est venu nous dire : « Tu es fou : cette nuit même on va de redemander ta vie. Et ce qui tu auras accumulé, qui l’aura ?  Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même, au lieu d’être riche en vue de Dieu. » Ce qui veut dire, qu’il est essentiel de partager, car on ne vit pas pour soi. Accumuler en ne pensant qu’à soi, n’est-ce pas le drame qui traverse la société. Cette mentalité nous  enferme et nous la communiquons largement à nos proches, sans trop y réfléchir. Comme si notre seule ambition se réduisait à avoir mieux  et plus que les autres, sans trop se fatiguer.

Ce qui nous est demandé, c’est de gérer le bien de toute l’humanité et non de nous enrichir personnellement. Car l’enrichissement des uns se fait toujours au détriment des autres. L’accaparement  des uns affame les autres, la pollution des uns empeste les autres… Ne nous déchargeons pas trop vite sur les “politiques” car, dans ce réseau d’interdépendance, chacun de nous, si petit soit-il, à son rôle à jouer. 

Tous les ans, le CCFD-Terre Solidaire invite à la réflexion et à l’action dans le sens de la planète et le respect du développement de toute l’humanité. 
Cela suppose évidemment une certaine vision du monde, un regard de foi sur  notre destinée, et cela exige que nous ne limitions pas notre horizon aux seules choses de la terre. 

Rude chemin pour un croyant dans un monde qui pousse à la facilité relative, qui nous pousse à la consommation avec un lendemain qui déchante bien souvent.
Que le Seigneur nous donne lucidité et sagesse – sans elles, les chrétiens ne pourront témoigner de rien au milieu de ce monde.

François, prêtre retraité