Ma mère et mon père sont tous deux nés en 1948. Je touche du bois, ils sont toujours vivants, pour longtemps encore j’espère.
En 1948 est également « née » une étude scientifique portant sur 5 209 volontaires.
Elle devait s’étaler sur vingt ans… et cela fait 72 ans qu’elle dure !
Elle a profondément bouleversé nos connaissances dans le domaine de la santé cardio-vasculaire.
C’est l’étude de Framingham.
Bienvenue à Framingham
Voici Framingham, une petite ville du Massachussetts, aux États-Unis.
Sa mairie :
Son parc :
Et, surtout, son université :
En 1948, Framingham comptait environ 25 000 habitants (elle en compte trois fois plus aujourd’hui).
Le congrès américain l’a alors choisie pour mener une étude épidémiologique de grande ampleur, et au long cours,sur les facteurs de risques de santé cardiovasculaire liés au mode de vie.
Pourquoi Framingham ? Parce que :
Sa population était représentative de la population américaine ;
Elle avait déjà une petite université ;
Ses habitants, consultés, se montrèrent intéressés par la santé.
5 209 personnes entre 30 et 62 ans se portèrent volontaires pour participer à cette étude.
Un habitant sur cinq ! C’est énorme.
Tous les trois à cinq ans, les participants consentaient à un examen médical détaillé, comprenant un interrogatoire sur leurs habitudes de vie, des tests physiques, mais aussi leur moral, et leur situation sociale et maritale.
L’étude était censée durer vingt ans. En 1968, elle avait livré beaucoup des réponses attendues que les chercheurs se posaient (je vais revenir bientôt sur ces découvertes).
Toutefois, le congrès américain décida de la prolonger, et de lui donner plus d’importance encore.
Car ces découvertes étaient trop importantes. On ne pouvait pas s’arrêter en si bon chemin.
Les participants, leurs enfants, et leurs petits-enfants
A la cohorte originale des 5 209 participants on décida d’ajouter (toujours sur la base du volontariat) :
Les époux et épouses ;
Les enfants ;
Les petits-enfants (à partir de l’âge de vingt ans).
A cette cohorte et sa descendance s’est ajoutée au milieu des années 1990 une nouvelle cohorte, accueillant la diversité sociale et ethnique qu’avait entretemps accueillie Framingham, toujours sur le principe de représentativité de la population américaine.
Depuis maintenant 72 ans,plus de 3000 études validées par des pairs (soit par d’autres chercheurs qui ne les ont pas eux-mêmes menées) ont été publiées dans des revues médicales à propos de Framingham.
Dès les années 1960, la cigarette et l’activité physique au cœur des découvertes
C’est au début des années 1960 que la ""Framingham Heart Study » a livré de premiers résultats[1].Les Américains apprennent que :
La cigarette augmente le risque de maladie cardiaque ;
Une tension artérielle élevée augmente ce même risque, notamment celui d’infarctus ;
Une activité physique régulière réduit ce risque ;
L’obésitéest étroitement liée à une mauvaise santé cardiaque.
Cela vous semble le B.A.-BA aujourd’hui, j’imagine !
Mais à l’époque c’était révolutionnaire. Imaginez le coup de tonnerre qu’a pu être, dans l’Amérique des années 1960, pays des toutes-puissantes marques Marlboro et Camel,l’annonce du lien direct entre la cigarette et le risque de mourir d’une maladie cardiaque!
Ces résultats ont irrigué la médecine de la seconde moitié du XXè siècle. On les doit aux
5 209 participants de la cohorte originale, dont on peut dire, sans exagérer, qu’ils ont sauvé des centaines de milliers de vie.