mercredi 9 janvier 2019

Le message du Père François

Évangile de Jésus Christ selon St Luc 3 15,16–21,22
« En ce temps-là, le peuple venu auprès de Jean le Baptiste était en attente, et tous se demandaient en eux-mêmes si Jean n’était pas le Christ. Jean s’adressa alors à tous : « Moi, je vous baptise avec de l’eau ; mais il vient, celui qui est plus fort que moi. Je ne suis pas digne de dénouer la courroie de ses sandales. Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu. » Comme tout le peuple se faisait baptiser et qu’après avoir été baptisé lui aussi, Jésus priait, le ciel s’ouvrit. L’Esprit Saint, sous une apparence corporelle, comme une colombe, descendit sur Jésus, et il y eut une voix venant du ciel : « Toi, tu es mon Fils bien-aimé ; en toi, je trouve ma joie. »

L’évangéliste Luc n’a pas connu Jésus durant sa vie publique. Il commence son évangile en disant : « Je me suis renseigné avec soin sur tout ce qui s’est passé depuis le début, et j’ai décidé, moi-aussi, d’écrire un récit bien composé. Je fais cela pour toi, très cher Théophile. »
Luc décrit les situations concrètes qui marquent la société de son époque et ce que la première communauté chrétienne a mis en valeur. Nous sommes en présence de personnes qui ont envie d’un changement profond dans la vie sociale, religieuse et politique de leur temps. Les Romains occupent la Palestine et les autorités religieuses se conduisent comme des « valets
». Ils n’hésitent pas à penser, avant tout, à leurs avantages et à leurs combines. Ils ont failli à leur mission de chefs spirituels, pour des intérêts mesquins. Cette dérive est une tentation de tous les temps. Sous des formes différentes, on retrouve aujourd’hui les mêmes dérives dans toutes les sociétés : soif de pouvoir, de domination, d’enrichissement…. Tout cela entraîne du mépris à l’égard du tout-venant. Le pouvoir est confié à des personnes pour qu’elles se mettent au service de l’ensemble, mais trop souvent, elles se contentent de servir ce qui les arrange. Pourtant le sens de la responsabilité est bien connu. A toutes les élections, que ce soit par les lobbies, par les partis, par les actionnaires, ils mettent en avant le rôle social des investissements, mais le résultat montre que la misère ne fait que s’agrandir. Au départ, les multiples manifestations des « gilets jaunes » ont été d’abord des cris de misère. Et la cause de cette misère qui s’agrandit, n’est pas due à l’incompétence, mais aux intérêts cachés qui ne sont jamais avoués. Les autorités promettent des sorties de crise, tout en sachant qu’ils ne pourront jamais les réaliser.
Aujourd’hui, en célébrant le baptême de Jésus, cherchons à comprendre pourquoi Jésus prend place dans la file de ceux qui vont au désert, vers Jean Baptiste. Ce sont des gens qui ont besoin de changement. Ils ne supportent plus les fardeaux qui s’ajoutent. Par sa présence au milieu d’eux, Jésus souligne l’urgence de changer de vie, de se convertir, de se mettre au service de la famille humaine. Jésus se mêle aux gens qui ne se contentent plus de belles déclarations et promesses, mais il invite chacun à faire ce qui est à sa portée, pour que le monde soit plus vrai, plus juste et plus beau. C’est ce que Jean Baptiste nous disait déjà au 3ème dimanche de l’avent : « Que celui qui a deux vêtements partage avec celui qui n’en a pas. Et que celui qui a de quoi manger fasse de même….. » Jean Baptiste renvoie chacun à sa situation concrète, là où il peut et doit agir.
Aujourd’hui, comme au temps de Jean Baptiste, les personnes et les peuples « sont en attente » et espèrent des jours meilleurs. Et parmi eux, beaucoup désespèrent et n’attendent plus rien. Ainsi, nous côtoyons des personnes qui sont au bord de la déprime parce qu’ils ne voient plus d’issue. Tout semble les enfermer. Mais nous connaissons aussi des personnes qui s’investissent au service de leur famille, dans leur travail, dans leurs associations. Ce n’est pas du temps perdu que de prendre du temps pour comprendre et chercher les moyens de soutenir les personnes qu’on accompagne. Au contraire, c’est même la source de la vie, du partage, de la joie et de la reconnaissance.
Pour en revenir à notre propre baptême : nous sommes plongés dans la vie humaine comme Jésus l’a été. Donc, il n’est pas besoin de chercher ailleurs dans le rêve ou sur une autre planète, le monde réel où se construit le Royaume de Dieu et dans lequel nous sommes incarnés. C’est donc bien à partir de notre existence concrète, de nos liens, de nos chagrins, de nos espérances que Jésus nous appelle. Tout en prenant le chemin du Jourdain pour rejoindre Jean- Baptiste, Jésus invite chacun à se laisser plonger, comme lui, dans l’Esprit de Dieu. N’est-ce pas cela que nous avons à mieux réaliser aujourd’hui ? Cela suppose un temps de recul, de réflexion, de partage et de prière pour y déceler les appels de Jésus. En étant disponible à l’Esprit Saint, nous mettons en œuvre le Royaume de Dieu dès maintenant. Le baptême chrétien nous engage à donner le meilleur de nous-mêmes, pour que grandisse ce Royaume de Dieu au milieu de nous.
François, prêtre retraité